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J'ai fait ricochet - Villegénis, Hurepoix - 1er juillet 2018

Peut-être est-ce mon chat, Johannis, grand amateur d'art
et que l'on a aperçu au détour d'un article, l'année dernière,
qui est à l'origine de cette action où « j'ai fait ricochet »...

Toujours est-il qu'à l'appel de deux collectifs d'artistes,
La Folie Kilomètre et Des ricochets sur les pavés,
un pique-nique avait lieu au parc du château de Villegénis,
ce dimanche 1er juillet, dernier temps artistique d'une suite d'événements, marquant l'ouverture définitive du lieu au public.
Aujourd'hui, on écrit « Vilgénis » ; 
mais longtemps ce fut « Villegénis » qui rend mieux compte
de l'étymologie qu'on attribue au lieu : « Villa Johannis »,
la villa de mon chat.
Surtout, et malgré les outrages répétés qu'on lui a fait subir, 
autrefois et naguère, et propres à l'avilir, le lieu n'a rien de vil. 
J'écrirai donc « Villegénis ».
D'ailleurs, c'est ainsi qu'est titrée (en bas et à gauche) l'aquarelle que j'ai achetée sur ebay le mois dernier, chez un marchand de dessins anciens où j'ai mes habitudes :  
« Villegénis, 19 mai [18]55, n°2, la Glacière »


Adolphe Alfred Michel JUNOT, 3e duc français d'Abrantès
(Ciudad Rodrigo, Espagne, 15 nov. 1810 -
Brescia, Italie, 19 juillet 1859)
La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855,
aquarelle sur traits de crayon,
246 x 335 mm
(détail)
Coll. Hervé MOLLA
© Hervé MOLLA - 2018



Cette œuvre provient d'un album, aux armes des ducs d'Abrantès,
vendu à l'hôtel Drouot (Fraysse & associés, 11 oct. 2017, lot 17),
réunissant une cinquantaine d'aquarelles 
(certaines très-abouties et très-soignées, très-méticuleusement réalisées, d'autres très-enlevées, et rapidementt, certaines signées et d'autres non) et de dessins, dans différents formats, 
réalisés entre 1840 et 1855 par Alfred JUNOT 
(le second fils du célèbre général Junot, « Junot la Tempête »,
1er duc d'Abrantèset de Laure Permon, la non moins célèbre duchesse d'Abrantès);
lui, officier d'état-major, 
aide de camp du général Mac Mahon (23 septembre 1848),
puis du prince Jérôme (9 janvier 1854) ;
ce dernier propriétaire de Villegénis depuis 1852, nous y voici.

Ayant acquis plusieurs œuvres de cette collection,
dispersée en feuilles, sans ordre (et comme c'est regrettable !),
œuvres acquises par moi de manière à reconstituer de petits sous-ensembles cohérents (et comme pour palier autant que possible à ce désastre mémoriel), mais modestes, à la mesure de mes pauvres moyens, mais en faveur de documents historiquement exceptionnels
pour certains (j'en reparlerai peut-être une autre fois),
j'ai manqué les trois autres aquarelles se rapportant à Villegénis.
Dans des formats très-voisins, elles figuraient une vue du Château, le 5 juin 1855 (aquarelle annotée « n°4 », de la même main, mais postérieurement ; une autre du Moulin, le 20 mai 1855 (et peut-être s'agissait-il du moulin de Gray ?), la troisième. 
Je ne me rappelle plus l'aquarelle manquante, la toute première.
Celle de la Glacière porte, on l'a vu, le n°2 
(lui aussi ajouté postérieurement, sans doute lors de l'insertion
de la suite des quatre aquarelles dans l'album).
Peut-être Alfred Junot a-t-il produit d'autres aquarelles encore
à Villegénis ; aquarelles qu'il aurait lui-même dispersées  et qui réapparaîtront un jour, non pas « anonymes » (car tous, dessins et aquarelles de l'album, et comme les autres sans doute, sont généralement annotés et datés avec une précision militaire) mais orphelines de père.
Alfred Junot est mort à Brescia, (19 juillet 1859) des suites de blessures reçues à la bataille de Solferino (24 juin 1859).
A la faveur de ma rencontre avec son œuvre et de ce que j'en perçois, je suis intimement persuadé qu'il était un très-chic type.
J'ai une pensée très fraternelle pour lui.

Il est donc question de séparation, de réunion et de la chronologie qui préside à ces actions.
Il s'agit pour moi, placé dans cette conjonction inouïe, de présenter l'aquarelle (dont je me trouve le dépositaire) sur le site-même qu'elle représente dans l'état qu'il était voici 163 ans.
Sans être un fou des kilomètres, je réponds donc à l'injonction de « La Folie Kilomètre » et m'inscris au pique-nique auprès « Des ricochets sur les pavés » (je ne sais trop comment s'articulent leurs interventions respectives dont j'ai eu connaissance en tapant simplement « Villegénis » dans mon moteur de recherche, à la recherche d'une histoire un peu fouillée du lieu) : 
je propose d'apporter des fromages de chèvre fermiers 
(de mon amie Isabelle L***).
Par parenthèse, j'apprécie beaucoup qu'il soit demandé par les organisateurs de l'événement d' « apporter un plat salé ou sucré » et non « d'amener » comme on entend bien trop souvent ; et même chez les bourgeois, aujourd'hui
D'ailleurs, Brel a-t-il jamais « amené des bonbons » ?




Fromage de chèvre fermier d'Isabelle L***
sur assiette « Carola » de Villeroy & Boch®
© Hervé MOLLA - 2018

Glacière du commerce
© Hervé MOLLA - 2018

Installation :
Still life
au fromage de chèvre fermier d'Isabelle L***
sur assiette « Carola » de Villeroy et Boch®,
à la glacière du commerce & de l'Artiste,
et à la « La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »
d'Alfred JUNOT & de l'Artiste
© Hervé MOLLA - 2018



Sur place, encore fallait-il être capable de retrouver, dans le parc maintes fois loti et dont on ignore la topographie, le site de la Glacière, en espérant qu'il se trouverait accessible.
Par la chance qui caractérise mes rencontres, je fis lors du pique-nique, la connaissance de deux dames très-agréables et de beaucoup d'esprit, connaissant bien le lieu, et à des titres divers, et qui, comme de bonnes fées et comme dans les contes (où il y a des fées, des forêts impénétrables, des géants & des nains, des grottes, des monstres redoutables, etc.), m'aidèrent à trouver la fameuse Glacière, en bordure d'une friche industrielle, cachée parmi le lierre, les ronces & les orties, infesté.tées (de quoi ça a l'air !) de moustiques et de tiques (peut-être eux-mêmes infestés.ées, comment savoir ?)et sous les marronniers & les ifs devenus géants.
Peut-être ceux-ci avaient-ils été plantés du temps que la glacière fut construite, sous le huitième prince de Condé ?
Une glacière n'avait alors rien de spectaculaire (un peu plus tard, dans les dernières années de l'Ancien Régime, oui) ; ce qu'il en reste aujourd'hui, encore moins !



La Glacière de Villegénis,
1er juillet 2018
(l'entrée est condamnée par une grille)
© Hervé MOLLA - 2018
 Importante parenthèse :
Si l'on s'intéresse aux glacières (et si l'on en est là, 
c'est sans doute qu'on s'y intéresse), on pourra lire 
le très-remarquable ouvrage de Christophe Morin, 
« Au service du château
L'architecture des communs en Île-de-France au XVIIIe siècle »
Editions de la Sorbonne, Paris, 2008
(2014 pour l'« Open Edition » disponible en ligne)

La Glacière de Villegénis,
1er juillet 2018
(détail de l'appareil en grès du couloir d'entrée)
© Hervé MOLLA - 2018

La Glacière de Villegénis,
1er juillet 2018
(au sommet du tertre,
autoportrait en pied de l'Artiste
qui porte des mocassins « Barth » de Paraboot®
et un chino Dockers®)
© Hervé MOLLA - 2018

La Glacière de Villegénis,
1er juillet 2018
(devant l'entrée de la Glacière,
l'Artiste porte un polo « Classic Fit » Lacoste®
ainsi que l'aquarelle
« La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »
par Alfred JUNOT,
sous encadrement récent)

On comprend aisément
(de part la distance) 
qu'il ne s'agit aucunement d'un « selfie »
que l'Artiste ici « partage » ou partagerait, 
mais d'une photo prise (avec l'appareil photo de l'Artiste) 
par une personne « du public » éminemment consciente 
de l'incapacité (conjoncturelle ou fondamentale) de l'Artiste
à prendre un « selfie » (même en la circonstance),
et soucieuse de lui venir en aide.
« On est toujours le Christophe de quelqu'un. »
Photo DR - 2018

La Glacière de Villegénis,
1er juillet 2018
(au-dessus de l'entrée de la Glacière,
« La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »,
aquarelle par Alfred JUNOT
© Hervé MOLLA - 2018

La Glacière de Villegénis,
1er juillet 2018,
« La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »,
aquarelle par Alfred JUNOT,
sous encadrement récent
et verre anti-reflets Clarity®
© Hervé MOLLA - 2018

La Glacière de Villegénis,
1er juillet 2018
« La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »,
aquarelle par Alfred JUNOT
© Hervé MOLLA - 2018
« La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »,
aquarelle par Alfred JUNOT,
246 x 335 mm
Coll. Hervé MOLLA
© Hervé MOLLA - 2018




On est au milieu de l'après-midi, d'après l'ombre portée 
par le personnage féminin qui anime l'aquarelle et,
sur le panorama que présente celle-ci, 
on devine le fameux étang en forme de bicorne, 
avec la vallée de la Bièvre au-delà ; 
on aperçoit la ville de Verrières, à droite sur la hauteur, 
avec son église et, 
plus bas et à gauche, le hameau d'Amblainvilliers ; 
plus près, on remarque un talus maçonné sur la gauche 
(dont le bel appareil en grès, vu tout à l'heure, 
est peut-être un vestige), et à droite une dame 
qui manie son balai dans une action que l'on ne comprend pas bien
(et dont l'image servira à un autre prolongement artistique 
à mettre en relation avec « Qu'est-ce qu'elles disent ? »
un travail participatif datant de l'été 2009 (inconnu sur ce blog)
et qu'il serait intéressant de réactiver un jour.
Mais on ne comprend pas ce que figurent ces marques diagonales
du premier plan, de même couleur que le talus maçonné....


Site de la Glacière de Villegénis,
plate-forme telle que figurée sur
l'aquarelle par Alfred JUNOT
« La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »
(état actuel, 1er juillet 2018)
 © Hervé MOLLA - 2018



Aux abords immédiats de la Glacière,
et puisqu'il est question d' « environnement »...



Site de la Glacière de Villegénis
(état actuel, 1er juillet 2018),
marronnier récemment abattu
 © Hervé MOLLA - 2018



Site de la Glacière de Villegénis
(état actuel, 1er juillet 2018),
racines d'un if géant
emprisonnant des tuileaux
(l'un et les autres contemporains
de la construction de la glacière ?)
 © Hervé MOLLA - 2018



Site de la Glacière de Villegénis
(état actuel, 1er juillet 2018),
stigmatisation d'un arbre
au moyen d'un tag en forme de croix de Saint-André rose
(signe de la sauvegarde de celui-là
ou bien de sa condamnation ?)

 © Hervé MOLLA - 2018



Site de la Glacière de Villegénis
(état actuel, 1er juillet 2018),
stigmatisation d'un arbre
au moyen d'un tag en forme de croix de Saint-André rose
(même interrogation que précédemment)

 © Hervé MOLLA - 2018



Site de la Glacière de Villegénis
(état actuel, 1er juillet 2018),
stigmatisation d'un arbre
au moyen d'un tag en forme de pastille blanche
souligné d'un second tag plus discret, rose
(même interrogation que précédemment)

 © Hervé MOLLA - 2018



Site de la Glacière de Villegénis
(état actuel, 1er juillet 2018),
« Stigmatisation de l'architecte »
capable d'une chose pareille à proximité immédiate
d'une glacière du dernier quart de XVIIIe siècle(et peut-être, comme à Louveciennes,
par Claude-Nicolas Ledoux ?)
Si la fin justifie les moyens,la faim n'excuse pas ça !
 © Hervé MOLLA - 2018

Site de la Glacière de Villegénis
(état actuel, 1er juillet 2018),
« Scène de crime, vue depuis l'espace public »
 © Hervé MOLLA - 2018




Espérons que demain verra 
l'étude et la restauration de la Glacière de Villegénis,
dernier vestige, avec la grille des Princes semble-t-il,
du parc tel qu'il était au XVIIIe siècle.


Parc de Villegénis,
« Fragile Espoir »,
tag vert en forme de macule
posé sur le compost après passage du gyrobroyeur,
à proximité de la grille de Princes,
et relevé le 1er juillet 2018
© Hervé MOLLA -2018

Parc de Villegénis,
la grille des Princes, fermée et qui,
si elle s'ouvrait, le ferait sur une
« Nouvelle stigmatisation de l'architecte »
(si ce n'est lui, c'est donc son frère)
dont je n'ai pas le cœur de dire le pourquoi
tant il est indicible mais dont chacun,
puisque le parc est désormais ouvert au public,
pourra « faire l'expérience »,
comme on dit aujourd'hui
© Hervé MOLLA - 2018

« La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »,
aquarelle par Alfred JUNOT,
appuyée sur la grille des Princes
et regardant passer les gens,
1er juillet 2018
© Hervé MOLLA - 2018

« La Stigmatisation de La Puce,
Big Olaf, Nanard & autres architectes »

à l'un des piliers de la grille des Princes,
parc de Villegénis
(état actuel, 1er juillet 2018)
© Hervé MOLLA - 2018

« Nature morte sur un entablement », installation :
« La Glacière de Villegénis, 19 mai 1855 »,
aquarelle par Alfred JUNOT
posée sur l'un des piliers de la grille des Princes,
parc de Villegénis,
1er juillet 2018
© Hervé MOLLA - 2018



Epilogue :
Sur les quatre heures de l'après-midi,
après avoir remercié nos hôtes,
échappant aux discours des autorités et regagnant ma voiture 
(une C15 Citroën de couleur blanche
que j'avais garée à proximité du parc de Villegénis
sur l'une des places de stationnement 
de la résidence des Pervenches, je crois),
j'eus la surprise de trouver, garé à côté d'elle,
un petit camion frigorifique bleu & blanc.
Je n'ai pas dit « une glacière », mais il n'empêche :
certains applaudissements font chaud au cœur
tant ils semblent provenir de personnes 
faisant réellement autorité...

Citroën C15 blanche de l'Artiste
garée entre un camion frigorifique bleu & blanc
et une voiture bleue, l'un et l'autre de marques inconnues,
parking de la résidence des Pervenches,
à proximité du parc de Villegénis,
1er juillet 2018, milieu de l'après-midi.
« Ce qu'il y a de bien avec le blanc,
c'est qu'il va avec tout »
© Hervé MOLLA - 2018