Evidemment, celle-ci rend celui-là obsolète, alors qu'il l'était déjà, et donc obsolète doublement !
Aussi m'a-t-il fallu ajouter le présent codicille
à la version en ligne depuis deux mois.
L'obsolescence n'est pas toujours programmée ;
mais lorsqu'on fait le choix initial d'une « gouache anonyme et inachevée », il faut bien s'attendre à certains prolongements...
J'ouvre ici une parenthèse, comme souvent (alors que souvent on m'en fait le reproche, d'en ouvrir et d'en refermer, des parenthèses, les unes dans les autres comme des poupées russes ; alors qu'« en même temps », sur internet et même ailleurs, on ne fait plus que vivre dans les interstices, comme la crasse qui s'incruste. Du moins, si l'on a ce talent que requiert notre époque et si l'on n'est pas trop usé, surtout prématurément): je n'aurais pas dû dire « j'ai encore eu de la chance », car on pourrait comprendre que j'ai encore eu de la chance « dans mon malheur ».
Je n'ai eu aucun malheur (et même, « Tout m'est bonheur » pourrais-je reprendre à mon compte, et tout compte fait) ; non, j'ai tout simplement eu de la chance, encore une fois.
Car j'ai toujours eu de la chance ;
et même, il m'est très souvent arrivé de porter chance.
De façon inouïe (mais ce serait me vanter, aussi en matière de chance, ne parlerai-je que de la mienne) !
Ce sont même mes seuls talents !
Immenses talents que j'ai trop négligés et trop longtemps...
Je referme la parenthèse.
Car à ce rythme, l'œuvre en progrès risque de rester longtemps inachevée.
J'avais pourtant fait encadrer la gravure dont on se souvient :
On ne l'avait pas encore vue en situation :
Le reflet, bleu, relevé sur le verre anti-reflets Clarity®,
peut varier en fonction du point de vue adopté par l'Artiste.
Note immédiate concernant l'emploi de la majuscule initiale
au nom commun « artiste » : la raison n'en pas (contrairement à l'opinion de beaucoup, et si j'en juge par les commentaires trouvés fréquemment sur les réseaux) parce qu'un artiste (ou un président, ou une grande dame, ou l'amour lui-même, et même l'amour « avec un grand A »...) est quelqu'un d'important ; mais parce que je parle ici de tel artiste (en l'occurrence Hervé Molla) et non de l'artiste en général. Je referme la parenthèse.
On peut aussi très bien savoir se passer du reflet.
Puisqu'on peut en effet modifier son point de vue
(que l'on soit artiste ou qu'on ne le soit pas du tout).
Est-on mobile, ou ne l'est-on pas ? Aujourd'hui plus qu'hier.
On peut y trouver un immense intérêt.
On peut très bien trouver cela sans intérêt.
On peut très bien ne considérer que le reflet.
Faire le point sur lui
Considérer que la houppe du cordon du manteau de pair de France,
tout comme le motif du papier-peint de Marie P***,
ne sont que des prétextes.
Quel est le contexte ?
La seconde chance que j'évoquais en préface à cet article
(et mirage qu'il a fallu tenter de saisir lui aussi)
a été de pouvoir acquérir en vente publique
les « Mémoires du duc de Raguse, de 1792 à 1832,
imprimés sur le manuscrit original de l'auteur »,
Paris, Perrotin Libraire-Éditeur, 1857,
9 volumes in-8, demi-reliure de l'époque en veau vert,
dos à nerfs, complets de leurs illustrations,
avec de très légères rousseurs
(et contre une poignée de clous).
Mémoires parus posthumes, puisque Marmont (on s'en souvient) est mort en 1852.
Mémoires du duc de Raguse, etc., etc., etc., tome I posé sur le papier-peint à motif cachemire, etc., etc. Coll. Hervé MOLLA © Hervé MOLLA 2018 |
Ce qui est amusant, c'est que le « veau vert » de la reliure, et comme si celle-là revenait du diable vauvert,
s'il est effectivement vert dans sa partie qui borde les plats pour s'y être trouvé protégé du soleil, a viré sur le dos des volumes en une couleur entre le fauve et le bronze qui s'accorde mieux avec le papier-peint à motif cachemire.
Ce qu'il y a de bien avec le beige, et fût-il fauve,
c'est qu'il va avec tout...
Surtout, les plats en papier marbré aux deux tons de bleu,
protégés du soleil eux aussi, semblent avoir été faits pour leur rencontre avec le papier-peint !
Ce n'est pas d'aujourd'hui que les livres servent d'ornement.
Mémoires du duc de Raguse, etc., etc., etc., tome I posé sur le papier-peint à motif cachemire, etc., etc. Coll. Hervé MOLLA © Hervé MOLLA 2018 |
A s'attacher au livre, on n'en aura pas moins remarqué
que le papier-peint à motif cachemire
(et qui lui sert de champ comme ce fut le cas avec les images encadrées du.de la « work in progress ») a subi une « préparation », disons ; préparation qui, si elle casse manifestement le motif du papier-peint, « en même temps », ne fonctionne que par lui.
Mais, pour tous ceux qui ont toujours brûlé d'ouvrir un livre,
voyez, l'Artiste l'a fait pour eux :
Mais non content de manipuler les livres,
l'Artiste en fait encore la lecture (propose au moins un résumé subjectif de ce premier tome ; un résumé « critique », disons ; résumé utile puisqu'il est douteux que les lecteurs de ce blog, et bien qu'ils appartiennent à une élite francophone et francophile, lisent jamais les Mémoires du duc de Raguse ; et résumé agréable aussi je l'espère), assis dans un fauteuil en plastique vert bouteille du commerce, comme on l'a vu dans un précédent article, et comme le veau de la reliure :
p. 40 [Marmont et Bonaparte sont au blocus de Toulon
où Bonaparte remarque Junot (dont on reparlera ici)
qui a du courage, du jugement et une belle écriture] :
« Junot, fils d'un riche paysan des environs de Châtillon, était né à Bussy, dans le village même où M. de Bussy-Rabutin, etc.
[...]
Junot, de trois années plus âgé que moi, avait été mon condisciple au collège de Châtillon ».
Marmont, lui, est né en effet à Châtillon-sur-Seine.
Il mourra à Venise (la porte de l'Orient) en 1852.
Il ne le sait pas encore, évidemment.
Il s'y trouve pour la première fois en 1797 lors de la chute de la Sérénissime où il rejoint le général Louis Baraguey d'Hilliers chargé de la prise de possession de la ville.
p. 279 : Venise « ne montra d'ailleurs à cette époque, aucune vertu, et pas même cette prévoyance si nécessaire à tous les gouvernements, et surtout aux États faibles. »
On trouvera p. 367 et suivantes un chapitre
sur les « mameluks », très intéressant mais qui m'obligerait
à une trop vaste parenthèse.
On s'apitoiera p. 348 (il s'agit du mariage de Marmont, alors qu'il a vingt-quatre ans, avec Mlle Perregaux, fille de l'ancien « banquier du Comité de salut public » et bientôt régent de la Banque de France):
« J'avais conçu un projet dont l'exécution réussit pour le malheur de ma vie.
[...]
Je parlerai peu de cette malheureuse union, le moins qu'il me sera possible, quoi qu'elle ait joué un grand rôle dans l'histoire de ma vie ; souvent elle a été pour moi un obstacle en aggravant mes maux, mes chagrins, mes embarras ; jamais elle ne m'a apporté de joie, de secours ou de consolation ; mais elle a toujours contrarié et obscurci ma destinée. »
Surtout, on admirera l'usage du point-virgule...
Mémoires du duc de Raguse, etc., tome I posé sur le papier-peint à motif cachemire, etc., etc.,apprêté en onglets au module 19 x 19 mm, etc., etc., etc. Coll. Hervé MOLLA © Hervé MOLLA 2018 |
Le vert si cru de ce signet, et qui tranche si crument,
m'a rappelé l'un de ceux que l'on rencontre dans certains tableaux
de l'école de Crozant.
Bien qu'à l'autre extrémité du département,
la galerie 104 La Beytour, Felletin, est aussi dans la Creuse !
J'ai vite posé l'un des petits tableaux d'une paire
sur le champ du papier-peint aux motifs cassés.
Cela fonctionne très-bien comme ceci.
On comprend tout à fait ce que je veux dire.
Je ferai un accrochage une autre fois.
Ces petits tableaux le méritent grandement.
Peut-être même en ferai-je un sampling...
Les ruines de Crozant, huile sur carton toilé, vers 1900 (signature et dimensions tenues secrètes pour l'instant) Coll. Hervé MOLLA © Hervé MOLLA 2018 |
A ceux qui auraient réprouvé la violence du vert du signet,
je propose enfin, et en avant-goût d'un travail faisant appel
à des objets « trouvés sur place », la pose, sur le champ du papier-peint qui commence à nous être familier, de cette plaque de métal (trouvée en effet dans l'ancienne maison de Marie P***, désormais galerie 104 La Beytour),
qui satisfera, j'en suis convaincu, leur goût pour une harmonie moins fauve.
Heureusement en effet que tous les ménages ne sont pas comme ceux du maréchal-duc de Raguse !
Plaque de métal oxydé (recto) posée sur un champ du papier-peint à motif cachemire apprêté en onglets au module 19 x 19 mm et collés sur panneau (dimensions tenues secrètes pour l'instant) © Hervé MOLLA 2018 |
En épilogue à cet article qui s'est attaché,
en dépit de tant de digressions rhizomales,
à l'enrichissement de « l'œuvre en progrès »
avec l'encadrement de la gravure des grandes armes
du duc de Raguse et son accrochage,
aussi bien qu'avec la pose (les poses) du premier tome des Mémoires,
j'ai choisi ce passage d'une lettre de Marmont à sa mère,
de Milan, 8 juin 1796 (p. 326, op. cité) :
« Nous avons été à Vérone. J'ai vu le palais du prétendu roi de France ; il n'a pas plus d'appareil que son maître. Dix mille émigrés habitaient Vérone, ils sont tous partis à notre approche. »
Il est amusant (et même si l'on ne lit pas le latin)
que ce soit le « prétendu roi de France », Louis XVIII,
qui, un quart de siècle plus tard, octroiera au duc de Raguse
la devise « Patriae totus et ubique »
dont le phylactère flotte si fièrement, et comme un cri de guerre...